Christine Montalbetti
Une terrasse d’hôtel, un matin d’été, au Portugal. Un homme imagine les vies des clients autour de lui. Cette terrasse, comme une île, une bulle utopique, devient une chambre d’écho intime. « Toutes ces présences résonnaient en moi comme des parties de moi- même, plus ou moins connues, plus ou moins inconnues. Jusque dans leur étrangeté, jusque dans leurs différences radicales avec celui que je suis, celui que je crois être, c’était comme si j’étais moi-même constitué de tout ça. » Il y a là un jeune homme et une jeune fille qui ne voient pas la menace qui plane sur leur histoire, un couple plus mûr qui au contraire paraît hanté par la possibilité de la rupture, un professeur américain accompagné d’une jeune femme (mais qui sont- ils l’un pour l’autre ?) Une mère incertaine d’elle-même et son grand fils, ainsi qu’un jeune homme plus âgé qui griffonne dans un carnet. Sur tout ce petit monde veille Tiago, le serveur, qui est revenu habiter la petite maison de son enfance. Une présence tutélaire et discrète, bouleversante. Et puis il y a Gloria dont le regard trouble le narrateur. L’art de Christine Montalbetti est ici à son comble. Le roman devient ce hors-champ que seule la littérature est capable d’investir avec délicatesse. Une suite frémissante de probabilités et de conjectures qui relancent indéfiniment la curiosité, pour explorer ce sentiment si particulier, indéfinissable, à la fois léger et poignant, de la vie des autres,
de l’existence parmi nous qui se découvre dans la lumière troublante du conditionnel. Est-ce le moyen d’expérimenter une autre vie que celle qui nous a été donnée, comme un autre possible de nous-mêmes ? Ou aussi une façon de nous quitter un peu. Avec les germes d’un renoncement. Tout ce qui fait que nous sommes vivants.
Présente au salon le samedi